P. Doyen Philippe Capelle-Dumont
Président de l’Académie catholique de France
La question peut être entendue sous le mode de l’interrogation augustinienne : « Qu’est-ce donc que le temps ? Si personne ne me le demande, je le sais ; mais si on me le demande et que je veuille l’expliquer, je ne le sais plus. Pourtant, je le déclare hardiment, je sais que si rien ne passait, il n’y aurait pas de temps passé ; que si rien n’arrivait, il n’y aurait pas de temps à venir ; que si rien n’était, il n’y aurait pas de temps présent » (Saint Augustin, Confessiones Livre XI). Il faut en effet renverser les points de vue. Le catholicisme nous habite avant même que nous ne l’interrogions, nous environne avant même que nous n’allions vers lui, nous parle avant que nous en parlions. Telle est la situation paradoxale du catholicisme, par delà l’Occident, quand bien même certains annoncent sa disparition prochaine. Le véritable problème surgit lorsque l’on s’emploie à son objectivation : on comprend ainsi volontiers le catholicisme comme l’une « des religions du monde », voire comme « religion de la sortie de la religion » (Gauchet), mais on omet d’interroger sa qualification proprement « religieuse ». Reconduit aux motifs de l’expérience personnelle, on en oublierait sa rationalité – non pas seulement sa cohérence interne – universelle et déployée comme telle. Le traitant comme un beau réservoir de valeurs, on en viendrait à biffer ce qui est pourtant placé au cœur de sa définition : sa puissance actuelle d’engendrement.