Communication

Un projet de loi est censé apporter des améliorations substantielles aux conditions qui régissent la vie des citoyens. Nul doute que celui-ci soit porté par des intentions généreuses, mais leur mise en œuvre peut receler des pièges que le débat public doit mettre loyalement en évidence. Or, les objections sérieuses formulées à son endroit dans un esprit de contribution et de sagesse n’ont pas retenu l’attention des décideurs politiques gouvernementaux. Expression d’un trouble profond dans une partie notable de la population française, elles sont solidement argumentées. Or, elles sont traitées comme de simples prises de position partisanes, issues de traditions de pensée obsolètes.

Un double discours

La question bioéthique excède la compétence du seul politique ; elle réclame de la part de ceux qui s’en saisissent une connaissance large et précise de ses enjeux philosophiques et humains.

Or, les auteurs de ce projet de loi avalisent constamment deux types de discours incompatibles sans que personne ne s’avise de la contradiction.

Ainsi, d’un côté est revendiqué un attachement à la défense de la nature au sens de l’environnement et du climat, ce dont le mouvement écologique international illustre l’impérieuse nécessité. La nature est ici comprise comme une puissance comportant ses propres lois, imposant ses régulations et déclinant ses formes de résistance, discrètes ou violentes, face aux pollutions suscitées par les productions industrielles.

D’un autre côté, la nature biologique est étonnamment considérée comme ne délivrant aucune orientation ni aucune règle propre, mais comme un simple réservoir de données à l’égard desquelles le sujet humain est déclaré souverain et dans lesquelles il s’estime en droit de puiser à son gré.

Alors que la nature physico-climatique a réussi après plusieurs décennies à faire reconnaître le prix des dommages qu’elle subit et à mobiliser dans l’urgence les consciences autour du principe de précaution, tout se passe comme si la nature biologique, quant à elle, devait accepter son impuissance à faire valoir ses droits propres. Cette contradiction, qui semble avoir échappé aux rédacteurs, choque la raison, et elle conduit à des conséquences éthiques ruineuses.

Du risque anthropologique au détournement de la médecine

Ce double discours sur la « nature » trouve son point d’application dès l’article 1er dudit projet de loi :

 

L’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à un projet parental. Tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée ont accès à l’assistance médicale à la procréation.

 

En deux lignes, l’indifférenciation sexuelle est présentée comme le principe de l’accueil des enfants à naître, contrariant sans scrupule la pratique la plus constante et la plus reconnue de notre civilisation, et d’ailleurs de toutes les civilisations humaines connues. Devant une telle remise en cause des fondements de notre commune humanité, trois questions angulaires restent posées, que les autorités décisionnaires n’ont pas daigné traiter, sinon par un argument d’autorité :

  • la première concerne l’amalgame délibéré entre les différentes formes de couple au regard de la naissance, ignorant, dans un saut irrationnel, la nature de ses effets à moyen et long terme sur la croissance psychologique de l’enfant et son insertion sociale ;
  • la deuxième concerne le risque immédiat de marchandisation mondialisée de la procréation et des embryons, faisant de la naissance de l’enfant un enjeu financier qu’aucune considération éthique ne peut limiter ni normer ;
  • la troisième concerne le détournement de la médecine loin de la finalité thérapeutique qui est sa raison d’être et pour laquelle les citoyens acceptent de contribuer financièrement.

Face aux perspectives désastreuses que ce projet dessine, on ne peut se contenter de dire son inquiétude ou son indignation. Toutes les consciences éclairées et responsables, qui mesurent la place qu’occupe la relation entre les générations dans la formation et la préservation de notre humanité, doivent réclamer sans relâche aux promoteurs de la loi en vertu de quel droit ils s’en prennent à ce qui est le plus fragile et le plus précieux entre les hommes.

La génétique du futur entre promesses et menaces

Nous sommes au seuil de l’histoire de la génétique et de son rôle dans la vie des sociétés. Dans quelques décennies, elle sera présente, en corrélation avec la chimie et l’intelligence artificielle, dans tous les secteurs de la vie quotidienne et sera placée au cœur de la plupart des choix de société. L’orientation aujourd’hui donnée par ce projet de loi en faveur de la généralisation de la procréation médicalement assistée, généralisation justifiée par un projet idéologique de « déconstruction » sociale, nous engagerait si elle était mise en œuvre sur une trajectoire d’humanité qui comporterait alors bien plus de menaces que de promesses.

 

Déclarations solennelles de l’Académie catholique de France sur les questions bioéthiques :